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Comprendre l’essence de la copropriété

Perçue à l’origine comme une propriété et un mode de vie bourgeois, la copropriété s’est démocratisée et a pris la tête du peloton en immobilier, en faisant aujourd’hui un des seuls moyens d’accéder à la propriété pour une proportion grandissante de jeunes adultes.

Condoliaison

Or, l’essence de ce qu’est la copropriété n’est pas toujours claire pour les premiers acheteurs. Bien comprendre les tenants et aboutissants de cette forme juridique de propriété est fondamental pour en assurer la pérennité – comme milieu de vie harmonieux et comme patrimoine bâti.

Ainsi, le spécialiste et professeur-chercheur Yvon Rudolphe insiste sur l’importance de bien déterminer les raisons qui motivent l’achat d’une copropriété. « Si vous voulez plus de services à proximité de votre domicile, il est im portant de bien analyser votre quartier auparavant, insiste-t-il. Si un copropriétaire cherche à s’enrichir, il doit savoir à quel coût.

Les travaux sont à la charge du propriétaire. Il est essentiel de se protéger contre ces problèmes avant d’acheter ». Yvon Rudolphe suggère de bien cibler et comprendre le type de copropriété avant son achat. « Les copropriétés de dix logements ont moins de valeur qu’une autre comptant davantage de copropriétaires. Des enjeux financiers découlent de la gouvernance, et certains administrateurs ne sont pas au fait de la gestion d’une petite copropriété. »

La cible de son analyse : la copropriété divise. « Les gens ne connaissent pas les enjeux particuliers, poursuit le consultant et expert en gestion immobilière Yvon Rudolphe. Les gens achètent encore une copropriété comme s’il s’agissait d’une maison unifamiliale. Il existe des facteurs endogènes et exogènes à prendre en compte, ce que beaucoup d’acquéreurs ne font toujours pas. »

Afin de prendre la décision la plus éclairée possible concernant l’achat d’une copropriété, Yvon Rudolphe suggère d’examiner quelques paramètres. « Avant de faire l’acquisition d’une copropriété, il faut regarder les besoins au mètre carré afin d’éviter la surconsommation d’énergie et de garder la maîtrise de l’espace dans le temps. L’espace, l’énergie et le temps sont les trois variables à prendre en compte. Ensuite, il faut s’assurer que la valeur de la copropriété est en corrélation avec la taxation municipale. »

Miser sur l’esprit de communauté

Ce point de vue rejoint celui de Micheline Renault, de l’ESG UQAM, et elle l’approfondit. « Il existe de grandes différences entre les petites et les grandes copropriétés. L’administration en fait partie. Dans une grande copropriété, le budget est élevé pour les services de parties communes, et le syndicat dispose plus souvent de ressources compétentes. Il n’existe pas de souci d’entretien. À l’opposé, lorsque j’achète dans une petite copropriété, j’achète aussi l’obligation de m’impliquer dans la gestion de ma partie allouée. Si on est chanceux, l’entente peut régner, mais le conflit peut rapidement être pris de manière personnelle avec un administrateur, puisque la structure est plus petite. Il faut savoir qu’au Québec, 90 % des copropriétés comptent 20 logements ou moins. »

Afin d’améliorer l’expérience dans les copropriétés, Micheline Renaud estime qu’une nouvelle culture de règlement des litiges en copropriété est essentielle. « Il faut à tout prix que Québec crée une autorité pour agir en cas de litiges dans les copropriétés. Il faut que les différends puissent se régler rapidement avant que cela ne devienne un enfer. Certaines situations s’éternisent, et on ne peut pas laisser les gens livrés à eux-mêmes de cette manière. »

D’ailleurs, le projet de loi 8, Loi visant à améliorer l’efficacité et l’accessibilité de la justice, va en ce sens. Adopté en mars 2023, celui-ci vise à favoriser la médiation et l’arbitrage tout en simplifiant la procédure civile à la Cour du Québec. Les objectifs de désengorgement du système judiciaire ont également comme effet d’alléger les procédures (et la tension!) pour les syndicats de copropriété et les copropriétaires.

Or, le gouvernement n'a pas prévu les budgets nécessaires et les retombées ont plutôt l'effet inverse. La résolution de conflits hors cour, par le biais de la médiation et de l'arbitrage, demeure pour l'instant la meilleure option.

Choisir un mode de vie

Pour autant, Micheline Renault estime que la copropriété reste une bonne option. « Cela démarre par une motivation per sonnelle et financière. On recherche une résidence agréable pour y vivre de façon permanente. C’est une façon aussi d’être propriétaire sans avoir les soucis d’entretien d’une maison. C’est en plus un véhicule d’épargne ou de placement pour la retraite ou pour un achat futur. Pour de plus en plus de jeunes, c’est la seule manière d’entrer dans le marché immobilier, et pour de plus en plus de personnes âgées, c’est la seule manière de rester à domicile tant que la santé le permet. »

D’autres raisons poussent les particuliers à s’orienter vers la copropriété. L’enseignante montréalaise y voit certains aspects pratiques. « La population vieillit de manière générale et les gens ne veulent plus ou ne peuvent plus s’occuper d’un jardin. Les projets de vie changent et on a tendance à vouloir voyager davantage par exemple. Ainsi, la copropriété est bien plus abordable que la maison unifamiliale – et apparaît comme plus raisonnable. »

La copropriété a de beaux jours devant elle et Me Marie-Cécile Bodéüs, associée et directrice de l’équipe litige copropriété au cabinet De Grandpré Jolicoeur, est convaincue du bien-fondé de celle-ci, à condition aussi de maîtriser son affaire. « Cela reste un super beau mode d’habitation qui est légiféré. Il permet de vivre dans une résidence et d’être propriétaire tout en bénéficiant de services que je n’aurais pas seule. Cela reste tout de même de la mise en commun. Il existe sur le marché des copropriétés sans gestionnaire ou dont le gestionnaire n’est pas bien formé. Il faut qu’ils puissent connaître les règles et les lois, car elles ne sont pas les mêmes qu’en entreprise ou toute autre structure qu’ils ont connue. »