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Location à court terme en copropriété

Condoliaison

Les copropriétaires doivent se conformer à la réglementation sur l’hébergement touristique

par Me Wassim Hamdy

 

La destination de l’immeuble, prescrite dans la déclaration de copropriété, est l’indicateur clé qui détermine si un copropriétaire a le droit d’effectuer de la location à court terme ou non – et les modalités d’une telle location. Même si la déclaration de copropriété est muette sur cette question, il faut aussi se demander si les locateurs se conforment aux lois en vigueur sur l’hébergement touristique de courte durée.

Le 16 mars 2023, un événement tragique s’est produit dans un immeuble patrimonial à Montréal, qui a coûté la vie à sept personnes. La cause en a été notamment la non-conformité des logements offerts en location sur la plateforme Airbnb. En réponse à cette tragédie, Airbnb a annoncé qu’elle supprimerait de sa plateforme toutes les annonces de location à court terme de logements qui ne respectent pas la réglementation en vigueur au Québec. Quelle réglementation s’applique aux copropriétés ? Quels sont les droits et les responsabilités des copropriétaires et des syndicats ?

Au Québec, l’hébergement touristique de courte durée est réglementé par la Loi sur l’hébergement touristique (LHT) et son Règlement sur l’hébergement touristique. Les propriétaires de logements offerts en location doivent enregistrer leur établissement auprès de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ) – même s’il s’agit de leur résidence principale. Les locateurs doivent donc non seulement s’assurer de se conformer aux règles de zonage de la municipalité, mais aussi de détenir une attestation de classification de la CITQ. En effet, celle-ci est mandatée par le ministère du Tourisme pour gérer le programme d’enregistrement des catégories d’hébergement visées par la LHT et son règlement.

Qu’est-ce qu’un hébergement touristique ?
Pour être considéré comme un hébergement touristique, le logement proposé en location doit remplir cinq conditions, conformément à la Loi sur l’hébergement touristique :
1. Il doit s’agir d’un établissement,
2. offrant au moins une unité d’hébergement, telle qu’un lit, une chambre, une suite, un appartement, une maison, un chalet, un prêt-à-camper ou un site pour camper,
3. offert en location à des touristes,
4. contre rémunération,
5. pour une période n’excédant pas 31 jours consécutifs.

Ainsi, ces conditions ne sont pas applicables pour les locations de plus de 31 jours consécutifs. Les locateurs doivent alors utiliser plutôt le bail obligatoire fourni par le Tribunal administratif du logement, notamment pour les locations à des fins résidentielles.

L’obligation d’enregistrer un hébergement touristique

Plusieurs conditions doivent être respectées pour obtenir un enregistrement auprès de la CITQ. Dans le cas d’une copropriété, outre l’autorisation de la municipalité, ainsi que le titre de propriété et la preuve d’assurance responsabilité civile de 2 000 000 $, le copropriétaire qui souhaite devenir locateur à court terme doit fournir à la CITQ une copie de la déclaration de copropriété ou une autorisation du syndicat de copropriétaires, lui permettant d’offrir la location de sa résidence à court terme.

Les hôtes qui offrent de l’hébergement touristique de courte durée en dehors de leur résidence principale sont considérés comme des établissements d’hébergement touristique général et doivent, de ce fait, déposer une demande d’enregistrement en utilisant le formulaire approprié. En revanche, les hôtes qui offrent de l’hébergement touristique dans leur résidence principale sont considérés comme des établissements de résidence principale et doivent soumettre un formulaire différent. Dans tous les cas, cependant, les hôtes doivent obtenir un avis de conformité signé par leur municipalité avant de pouvoir présenter une demande d’enregistrement auprès de la CITQ. Cette démarche vise à s’assurer que les logements offerts en location répondent aux normes de sécurité et de qualité en vigueur dans la province.

Il convient de souligner que la location à court terme peut avoir un impact sur l’assurabilité de l’immeuble. En effet, l’assurance d’un immeuble détenu en copropriété divise dont la destination est résidentielle couvre généralement les dommages causés par des événements tels que des incendies, des dégâts d’eau, des bris de vitres et des vols. Cependant, si un copropriétaire décide de louer son unité à court terme, cela peut être considéré comme une activité commerciale et, par conséquent, mener à une augmentation des primes d’assurance pour le syndicat, voire lui faire perdre son assurance du fait que le risque est accru. Enfin, la location à court terme peut également avoir un impact sur la valeur de la propriété, en ce que les acheteurs potentiels peuvent être découragés de se porter acquéreur, par la présence de nombreuses unités offertes en location à court terme, ce qui pourrait réduire la valeur de la propriété.

Respecter la destination de l’immeuble et la déclaration de copropriété

Lorsque la destination de l’immeuble est résidentielle, les copropriétaires ont tout intérêt à se conformer à la loi ainsi qu’à la déclaration de copropriété. En effet, outre les clauses pénales qui peuvent être prévues dans cette dernière, interdisant la location à court terme, l’article 37, alinéa 1 de la Loi sur les établissements d’hébergement touristique, prévoit qu’une personne qui commet une infraction est passible d’une amende de 2 500 $ à 25 000 $, s’il s’agit d’une personne physique, et de 5 000 $ à 50 000 $, dans les autres cas. Il en va de même pour toute personne qui ferait une fausse déclaration dans un document prescrit par la loi et les règlements. Ainsi, le coût total des sanctions peut grimper avec célérité. À cet égard, un récent jugement a condamné une copropriétaire à verser au syndicat de copropriétaires un montant de 83 387 $, soit 49 000 $ au syndicat pour les infractions impayées, de même qu’une somme de 34 387 $ pour les honoraires extrajudiciaires de l’avocat du syndicat, pour avoir délibérément mis en location son unité à de multiples reprises sur Airbnb, et ce, malgré la clause de la déclaration de copropriété l’interdisant formellement. La Cour supérieure a également ordonné à la défenderesse, par voie d’injonction, de cesser de louer son logement pour des périodes de moins de 12 mois consécutifs.

Il est à noter que la discussion ci-dessus porte uniquement sur les copropriétés strictement résidentielles. Dans le cas d’une copropriété dont la destination permettrait la location à court terme, telle qu’une destination commerciale ou de villégiature, il serait inapproprié de voter un règlement interdisant la location à court terme à la majorité simple des copropriétaires réunis en assemblée, car cela entraînerait un changement de la destination de l’immeuble. Un tel changement exigerait plutôt un vote à la majorité des trois quarts des copropriétaires, représentant 90 % des voix de tous les copropriétaires.

Il est primordial pour les copropriétaires de respecter la loi et les règlements en vigueur en matière d’hébergement touristique pour éviter toute sanction financière ou pénale. En outre, cela permet également d’assurer la sécurité et la qualité des logements offerts en location sur les plateformes de location à court terme, telles qu’Airbnb, et de prévenir d’éventuels accidents tragiques comme celui survenu en mars 2023 à Montréal.